Violence scolaire
LES DOSSIERS / Un avis de spécialiste sur les propositions gouvernementales
Eric Debarbieux, sans doute le
meilleur spécialiste français de la violence scolaire, a l'habitude de dire que
sur ce sujet il faut à la fois se garder de minimiser les choses, de les nier
et de les sur estimer. C'est le privilège de Nicolas Sarkozy et de Xavier
Darcos que de réussir à tomber dans ces deux pièges.
En affirmant que les armes sont
devenues "banales" dans les établissements scolaires, Nicolas Sarkozy
exploite de façon démesurée des incidents malheureux mais qui ne sont pas en
progression. Car les statistiques officielles de la violence scolaire montrent
une stabilité de ses manifestations. L'idée qu'il y aurait une urgence vitale à
agir dans la précipitation n'est argumentée par rien de sérieux, au point que
le président est obligé d'aller chercher ses exemples à l'étranger.
Pour autant, N Sarkozy, tout comme
Xavier Darcos, sous-estime la violence scolaire. Tous deux ne réagissent
qu'aux incidents les plus médiatisés et réduisent la violence scolaire à celle
qui est exercée sur les adultes. Or chacun sait qu'elle se manifeste
principalement, et de loin, par le harcèlement répété qu'exercent les jeunes
sur certains de leurs camarades. On savait déjà que les mesures envisagées
(portiques de sécurité, fouilles, agents spéciaux) étaient irréalistes et
inefficaces (comment bloquer une intrusion dans un flux de 1000 élèves, combien
de temps pour passer à la machine 1000 cartables à 8 heures ??). Mais le
pire c'est qu'elles n'apportent aucun soulagement aux vraies victimes du
harcèlement scolaire.
Que reste-il alors de cette
déclaration présidentielle ? Certainement rien de concret. Rien dans ce
programme ne peut aboutir à des applications effectives. Le Snpden ne s'y
trompe pas quand il relève qu'aucun budget ne l'accompagne. Rien si ce n'est la
démonstration que pour la droite l'Ecole est devenu un objet électoral. Certes
le rapport Apparu montre qu'il reste à droite des contributeurs de qualité aux
débats sur l'Ecole. Ailleurs la droite libérale a su protéger l'Ecole des
tendances les plus conservatrices au nom de l'efficacité. Mais l'exemple
présidentiel peut nous faire craindre une utilisation politique "à la
genevoise" des thèmes scolaires. On sait à quel point les campagnes
politiques des conservateurs genevois et vaudois ont pesé négativement sur les
systèmes éducatifs de ces cantons. On sait aussi ce que cela a signifié plus
généralement dans ces cantons pour les enjeux de société en général de voir la
droite autoritaire dominer la droite libérale.
Pour ces raisons-là aussi, le
discours présidentiel est une mauvaise nouvelle pour l'Ecole. C'est aussi un
signal de sa radicalisation.
François
Jarraud
(Source Café pédagogique)
http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2009/05/29052009Accueil.aspx
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