Motions de la 11e CNU
ACTU / CNU de Villetaneuse (3 juin 2009)
jeudi 4 juin 2009, par laurence
La 11e Coordination nationale des Universités, qui s’est
tenue le 3 juin 2009 à l’Université Paris 13, a rassemblé 31 établissements
(universités et organismes) et 7 organisations (sociétés savantes, associations
et syndicats). L’intervention d’une représentante de la coordination nationale
des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité a permis de
souligner la similitude entre les réformes qui affectent l’ensemble du service
public, ainsi que la nécessité de renforcer la convergence des mobilisations.
Motion « Mastérisation »
Ignorant les oppositions fortes qui se sont exprimées depuis
plusieurs mois, le gouvernement précipite son projet de réforme du recrutement
et de la formation des enseignants du premier et du second degré. Se jouant de
la commission de concertation Marois-Filâtre qu’il avait lui-même mise en
place, il a fait adopter, dès le 28 mai, en Comité Technique Paritaire
Ministériel de l’Éducation Nationale, un arsenal de décrets détaillant les
dispositions transitoires et permanentes concernant les conditions de
candidature aux concours et de nomination comme fonctionnaire stagiaire. Il
rend caducs les travaux de la commission, en fixant de fait le calendrier des
concours. Ce nouveau manquement au processus démocratique de décision, inspiré
par des stratégies cyniques, qui a entraîné les réactions indignées des
syndicats, des collectifs, de la CNU, et même de la CPU et des directeurs des
Écoles Normales Supérieures et des IUFM, montre que, pour cette réforme aussi,
la volonté de concertation affichée par le gouvernement n’est qu’une façade.
Nous déplorons l’abstention de la FSU et du Syndicat
Autonome, lors du Comité Technique Paritaire du 28 mai 2009. La CNU appelle à
l’unanimité que tous les syndicats votent contre les décrets lors du Conseil
Supérieur de la Fonction Publique d’État du 12 juin 2009.
Nous réaffirmons notre opposition à cette réforme qui
entraîne notamment :
- l’affaiblissement de
la formation disciplinaire et pédagogique des futurs enseignants ;
- la mise en danger des
masters recherche dans la plupart des disciplines ;
- l’allongement d’un an
de la formation non rémunérée des futurs enseignants ;
- la remise en cause du
caractère national du recrutement par concours ;
- la création d’une
catégorie des « reçus-collés » (étudiants qui auraient obtenu
leur master mais échoué au concours), qui institutionnalisera la précarité,
présageant du démantèlement du service public d’enseignement.
Nous appelons les personnels et les composantes à une
réponse collective, en multipliant les points d’accord entre UFR et
IUFM. Comme cette année, nous appelons à la non-remise des maquettes des
masters "métiers de l’enseignement". Forts de notre action commune,
nous refusons de collaborer à cette réforme que nous jugeons néfaste pour
l’avenir de l’éducation.
Motion « Statuts »
La Coordination Nationale des Universités (CNU) s’oppose à
la destruction du service public de l’enseignement supérieur et de la recherche
par l’instauration d’une mise en concurrence des personnels de toutes
catégories et des établissements d’éducation et de recherche, préjudiciable à
l’action collective au service du savoir et des étudiants.
Elle récuse la réorganisation du ministère de l’Enseignement
Supérieur et de la Recherche, l’introduction des règles de management issues du
domaine privé et de critères de rentabilité dans l’enseignement supérieur et la
recherche, la précarisation systématisée des doctorants par le contrat doctoral
unique, la modulation des services instituée par le décret relatif au statut
des enseignants-chercheurs, l’approche quantitative de l’activité de recherche,
la modulation des rémunérations et les contrats d’objectifs imposés aux
personnels BIATOSS et ITA, la multiplication croissante et chronophage des
procédures bureaucratiques de contrôle et de demande de financement au
détriment de l’activité de tous les personnels de l’Université et des
organismes. La CNU dénonce la logique qui anime l’ensemble des réformes
relatives aux statuts de la Fonction publique, dans un mépris total des
principes qui régissent les biens publics, comme le savoir ou la santé.
La mission humaniste de l’enseignement supérieur et de la
recherche réside dans l’élaboration de la connaissance et la transmission du
savoir.
Cette mission est menacée par une définition du temps de
travail des enseignants-chercheurs qui ignore délibérément le temps
nécessairement consacré à la culture, à la réflexion et au renouvellement des
savoirs disciplinaires. Elle nécessite une indépendance effective des
enseignants-chercheurs, qui doivent pouvoir développer sereinement et librement
leurs activités, sans être soumis à une logique productiviste dépourvue de sens
en matière d’enseignement et de recherche. Son bon accomplissement est
incompatible avec la possibilité d’augmenter les charges de service au
détriment de l’activité de recherche, ainsi qu’avec l’évaluation de la
recherche en termes de résultats quantitatifs.
La mission de service public est incompatible avec la vision
purement économiste, baptisée « culture du résultat » et imposée à
l’ensemble des personnels. Elle est en opposition avec une mission de service
public rendu équitablement à tous. Dans un contexte de raréfaction budgétaire
et de répartition des moyens à la performance et à l’activité, la mise en
concurrence des agents et des services ne peut que nuire à l’égalité d’accès au
savoir sur tout le territoire et à l’intégrité des services. La CNU dénonce
plus largement les réformes coordonnées par la Révision Générale des Politiques
Publiques, inspirées par une rentabilité à court terme indifférente aux enjeux
de société.
En conséquence, la CNU continue d’exiger le retrait de
l’ensemble des réformes destructrices de l’enseignement supérieur et de la
recherche. Elle réclame l’abrogation de la loi LRU, des décrets relatifs au
statut des enseignants-chercheurs, au contrat doctoral unique, au statut des
fonctionnaires publics d’État et à la rémunération à la performance, la
cessation du processus d’externalisation des tâches administratives et
techniques, la restitution des postes supprimés en 2009 et une création massive
d’emplois dans l’enseignement supérieur et la recherche publics.
Motion « Postes et Moyens »
L’annonce faite par Valérie Pécresse, le 26 mai dernier, de
ne supprimer aucun emploi d’enseignant et/ou chercheur en 2010 et en 2011 dans
les universités et dans les organismes de recherche ne constitue pas une
réponse à la crise que traversent actuellement l’Université et la Recherche
publiques, d’autant qu’elle a annoncé, à plusieurs reprises, que des postes de
BIATOSS de catégorie C seraient, eux, supprimés. Par son refus de mettre en
place un plan pluriannuel de création d’emplois et du fait des incertitudes qui
continuent à peser sur le nouveau système d’allocation des moyens à la
performance et à l’activité, le gouvernement marque sa volonté délibérée de
poursuivre une politique qui vise à affaiblir l’Université, en l’appauvrissant.
Il n’apporte pas plus de réponse sur la question de l’amélioration du statut
étudiant, alors que les difficultés sociales et économiques constituent l’une
des principales causes d’échec dans l’enseignement supérieur. Seul un véritable
engagement financier de l’État, en direction des établissements et des
étudiants, est susceptible d’assurer le rattrapage des moyens alloués aux
étudiants d’université, notoirement insuffisants par rapport aux autres
filières de l’enseignement supérieur. De ce point de vue, la mise en place de
prêts étudiants, l’augmentation des frais d’inscription ou le recours aux fonds
privés, si souvent évoqués, ne sont que de fausses solutions, aussi dangereuses
qu’inefficaces, qui ne feront qu’accroître les inégalités entre établissements
et entre étudiants.
L’annonce du 26 mai 2009 ne met pas non plus un coup d’arrêt
à la casse des organismes publics de recherche. En la matière, la communauté
universitaire et scientifique s’alarme du mouvement de
« désumérisation » qui affecte nombre d’unités mixtes de recherche
(UMR) ; ce mouvement, qui se poursuit dans l’ombre, sans aucune
transparence sur son ampleur et sur les critères de décision utilisés par
l’administration, participe de l’affaiblissement du lien entre enseignement
supérieur et recherche, qui a fait jusqu’à présent la force du système
français. Il s’appuie sur une stratégie de division des différents acteurs de
l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, en promettant aux uns les
dépouilles des autres. Nous savons que personne ne gagne à de tels calculs
cyniques.
Notre détermination à défendre simultanément l’Université et
les Organismes de recherche dans le cadre d’un service public de l’Enseignement
Supérieur et de la Recherche, fondé sur les principes de laïcité et
d’indépendance à l’égard des pouvoirs économiques, politiques et religieux,
reste entière.
Motion « Actions »
Après 17 semaines de grève dans l’Enseignement Supérieur et
la Recherche, le gouvernement reste sourd aux revendications légitimes des
personnels et des étudiants. Maniant la démagogie, les provocations, les
menaces et la désinformation, il a instrumentalisé la question des examens et
de la validation de l’année universitaire pour mieux occulter les
revendications fondamentales de notre mouvement : la défense et le
renforcement d’un véritable service public de l’Enseignement Supérieur et de la
Recherche. Nous avons démontré notre capacité à préserver les intérêts des
étudiants d’aujourd’hui sans sacrifier les étudiants de demain.
Conscients de ces temporalités multiples et du caractère
structurel des réformes qui nous sont imposées, nous sommes aujourd’hui plus
déterminés que jamais à poursuivre notre combat dès maintenant et dans la
durée. Nous pouvons pour cela nous appuyer sur une conscience collective forte
des enjeux, ainsi que sur des réseaux de solidarité qui se sont constitués
depuis le début de notre mouvement aux échelles locales, académiques et
nationales, et qui trouvent aujourd’hui des résonances au niveau européen.
Cette construction d’une identité collective, intercatégorielle et
interdisciplinaire, dans nos pratiques pédagogiques et scientifiques et dans
les actions et les débats de fond que nous menons, constitue de fait une
salutaire réappropriation de l’Université. Elle s’élève déjà contre les
logiques d’autoritarisme ministériel et de soumission aux forces économiques
qui se cachent derrière la rhétorique de l’autonomie. Le mouvement
continue !
La 11e CNU apporte son plein soutien à toutes les
initiatives locales qui s’inscrivent dans notre combat collectif. Par ailleurs,
s’agissant de la mastérisation, elle appelle :
- la communauté
universitaire à ne pas élaborer les maquettes et/ou à ne pas les faire
remonter ;
- les syndicats à voter
contre les décrets présentés au Conseil Supérieur de la Fonction Publique
d’État du 12 juin 2009 et tous les membres de la Commission Marois-Filâtre
à s’en retirer ;
- à diffuser auprès des
enseignants du primaire et du secondaire une lettre ouverte, qui sera
écrite par les porte-parole de la CNU.
S’agissant des statuts, elle appelle :
- à faire voter par les
Conseils d’administration des établissements un engagement à ne pas mettre
en place la modulation des services, les entretiens professionnels et les
chaires d’excellence ; à signer la pétition ( http://www.jussieu.ras.eu.org/entretiens
) ;
- les membres du Conseil
National des Universités à refuser de procéder à l’évaluation de leurs
collègues dans le cadre de la modulation de service ;
- les personnels de
toute catégorie à refuser de façon coordonnée tout travail supplémentaire
non pris en considération, dès lors qu’il ne correspond pas à une décharge
ou qu’il n’est pas rémunéré ;
- à refuser d’assurer
les heures complémentaires au-delà de 192 heures équivalent TD ; à
établir lors des pré-rentrées un bilan des postes manquants et de l’emploi
précaire et à mener une campagne sur ce sujet ;
- à refuser les mesures
régressives du nouveau contrat doctoral et à maintenir les tâches des
doctorants dans les domaines exclusifs de la recherche et de
l’enseignement.
Elle appelle en outre à participer à :
- la ronde infinie des
obstinés de midi à minuit, organisée du 2 au 6 juin à Paris et en
province.
- la Marche de tous les
savoirs, à l’initiative de SLR, le 4 juin ;
- la 4e réunion de la
Coordination nationale des BIATOSS et ITA et à la 4e réunion de la
Coordination nationale de la Formation des Enseignants, le 6 juin ;
- une campagne de renvoi
des bulletins de vote inutilisés aux candidats aux élections européennes,
avec la mention « Universitaires en Colère », le 7 juin ;
- la 4e réunion de la
Coordination nationale des Laboratoires en Lutte, le 9 juin ;
- la nuit des
universités organisée à Paris 8 Vincennes—St-Denis, le 12 juin ;
- la manifestation
unitaire à l’initiative des confédérations syndicales, le 13 juin ;
- la ronde des obstinés
des 24h du Mans, le 13 juin ;
- la rencontre que la
Coordination Nationale des Laboratoires en Lutte se propose d’organiser à
Paris le 24 juin, à l’occasion de la tenue du Conseil d’administration du
CNRS au CERN (Lausanne, Suisse) ;
- la distribution de tracts
lors des épreuves du baccalauréat et lors des inscriptions des lauréats.
La Coordination Nationale des Universités invite l’ensemble
de la communauté universitaire et scientifique à participer aux
« Rencontres d’été de la CNU » que l’université Paris 7 organise les
27 et 28 juin 2009. Enfin, les représentants des Universités, associations,
sociétés savantes et syndicats réunis ce jour annoncent que la 12e réunion de
la Coordination Nationale des Universités se tiendra le mercredi 30 septembre
2009 à l’Université Paris 8.
Autres actions envisagées
Tout en soutenant les collègues engagés dans diverses
actions locales, comme les démissions des responsabilités administratives et
pédagogiques, le refus de siéger dans les conseils, la rétention des notes et
la non-tenue des jurys, la CNU appelle les personnels à :
- concernant la
mastérisation : • alerter les élus locaux et les inciter à prendre la
défense du service public de l’enseignement ; • sensibiliser les
inspecteurs d’académie ; • organiser des journées de discussion
UFR-IUFM ;
- concernant les
statuts : • déposer des recours contre les décrets ; • se
positionner contre la modulation et les entretiens professionnels dans
toutes les instances où ils peuvent siéger (Conseils de laboratoire et
d’institut, Conseils d’administration, Comités Techniques Paritaires,
Commissions Administratives Paritaires, Conseils d’UFR et de
département...) ; • demander tous une modulation à la baisse et à
contester la décision en cas de refus, si l’établissement a mis en place des
possibilités de modulation de service ; • refuser la mise en place
des entretiens professionnels au sein des établissements d’enseignement
supérieur et de la recherche ;
de façon plus générale : • boycotter les jurys
du bac ; • boycotter la vague A des évaluations de l’AERES, en envoyant
leur rapport à leur organisme de tutelle et non à l’AERES ; • boycotter
les expertises ANR et les appels d’offres ; • exiger le report de l’examen
par les Conseils d’administration du passage aux compétences élargies et à
organiser des campagnes d’information préalables dans chaque
établissement ; elle appelle les Conseils d’administration à refuser le
passage aux compétences élargies ; • organiser des consultations locales
sur les réformes en cours et à en centraliser les résultats ; • maintenir
et développer les formes alternatives d’enseignement (cours ouverts,
universités populaires...) comme forme de réappropriation des missions
fondamentales de l’université ; • demander aux présidents d’université de
banaliser une demi-journée par semaine pour que la mobilisation puisse
s’organiser et que puissent se tenir régulièrement des assemblées
générales ; • constituer un comité de solidarité et de veille sur la
répression ; • créer un réseau européen interuniversitaire ; • signer
la pétition « appel par anticipation à la démission de Claude Allègre de
son nouveau poste de ministre » ;
(www.jussieu.ras.eu.org/allegre) ; • participer aux « Quartiers d’été
de l’Université » en organisant des actions à l’occasion des événements marquants
de l’été (festivals, étapes du Tour de France, plages...).
(Source Sauvons l'université)
http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article2689
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